31.1.10

La métamorphose

Avec Ga on a remarqué qu'il nous arrivait de ne plus retrouver, à la fin d'un livre, ce qui avait retenu notre attention, provoqué notre enthousiasme, dans les pages qu'on avait cependant cornées.

C'est comme si on avait changé pendant le temps de notre lecture.

Mais ce n'est pas toujours au livre qu'on doit cette transformation.

"Yuna regarda le billet et demanda au jeune homme si elle ne pouvait pas changer à Paris plutôt qu'à Bruxelles. Elle avait beau savoir que le changement de train ne lui permettrait même pas d'apercevoir le sommet de la tour Eiffel, elle ne pouvait en cet instant réprimer une nostalgie inexplicable de cette ville.
Le jeune homme désigna l'écran et expliqua qu'à Paris, avec une correspondance, il fallait prendre le métro pour aller d'une gare à l'autre, tandis qu'à Bruxelles ce n'était pas nécessaire. Bruxelles était donc la meilleure solution. Bruxelles était toujours une meilleure solution sinon la meilleure. On ne peut jamais contredire Bruxelles, car Bruxelles est censé devenir la norme. Ouvre-t-on un quotidien que Bruxelles saute aux yeux en gros titre : Bruxelles veut plus de transparence. Bruxelles veut aider à coups de millions d'euros les victimes des catastrophes naturelles. Bruxelles veut encourager le dialogue. Bruxelles veut conquérir le ciel."
Yoko Tawada. Le voyage à Bordeaux.

1 commentaire:

elsia a dit…

En ce moment, pour des raisons diverses et unique, j'ai un problème avec Bruxelles (et la Belgique de manière générale). Et c'est alors que je m'aperçois de son omniprésence. Au coin des journaux, de la radio (tous les matins ou presque la météo de france inter me répète que le vent froid vient de la Belgique, que ne le sais-je déjà...), au coin-même de mon travail quotidien, je la croise, tapie entre deux étagères. Comme si le monde entier se liguait contre mes beaux efforts pour occulter temporairement ce pourtant petit coin du globe. Alors comme une enfant, je tape du pied et crie à l'impartialité ! C'est alors qu'en quête d'oasis, ma flânerie dominicale m'apporte sur ce rivage... Ne soyons pas fataliste : point de signe à y voir, je le sais bien. Juste l'acceptation à enfin accepter : Bruxelles existe, Bruxelles est là, on ne peut contredire Bruxelles. Juste reconnaître sa défaite.
Chère, très chère Gwen., sans le savoir, tu sèmes ainsi un caillou de plus sur le chemin qui est le mien... Ah la la la...