29.6.07

Une déclaration

"La première fois qu'Aurélien vit Bérénice, il la trouva franchement laide."
Il est des histoires qui ne commencent pas sous les meilleurs auspices...
Et moi aussi, quand je l'ai vu la première fois, j'ai été déçue.
Et j'ai réalisé mon inconséquence, mon inconscience -je ne sais même pas comment appeler ça- qui m'avait poussée à signer, sans l'avoir rencontré, ce contrat qui liait à lui mes jours et mes nuits...
C'est vrai, ça : c'est lui que j'allais voir à chaque réveil, tous les jours. C'est lui que j'allais retrouver tous les soirs.
Mais qui s'engage ainsi à l'aveuglette, sur la foi de belles paroles ?
Oui, ce premier jour, je me suis demandée ce qui m'avait pris...
Et puis...
Et puis, très vite, il a su me séduire.
Grâce à son calme immuable, sa bonne situation, ses rapports de bon voisinage, son accueil réconfortant...
Très vite, nous sommes devenus très intimes et il sait tout de moi. Il est témoin de mes excès, de mes faiblesses, de mes éclats de rire. Compagnon de mes nuits courtes ou blanches, il veille sur mes siestes anarchiques...
A présent, je ne lui trouve que des qualités et je suis secrètement fière que tous mes amis soient également sensibles à son charme.

Ah oui, vraiment, ce palazetto a tout d'un palace et, chez lui, je me sens un peu reine !
J'aime tout de lui, j'aime toutes ses pièces, de la chambre au grenier, de la bibliothèque au dressing... du salon au balcon, à l'heure du vent et du oolong.





28.6.07

C'est jeudi !



Contrairement à l'idée que beaucoup s'en font, Madame Gâ n'est pas Japonaise. Si elle l'était, ça serait moins facile de lui écrire tous les jeudis.

27.6.07

Trois bonnes adresses

Cet après-midi de novembre, au dernier étage, devant un lait de soja et la ville qui s'étendait devant nous, nous avions constaté à quel point notre vie était simple et belle.
Mais, le soir même, on s'était employé à compliquer la mienne...

Il est des portes qu'il faut savoir claquer.
Il est des lieux qu'il faut savoir partager.

Un restaurant de tofu à Ebisu. Un salon de thé à Takadanobaba.

Et le Canal Café. Evidemment.

26.6.07

Tuesday self portrait


"On sait qu'il suffit d'être seule. Le monde est grand quand on est vraiment seule. Je sais qu'il suffit d'être seule pour tuer le temps et ne plus être seule. Suffit d'être seule. Mais pas vraiment seule.
Faire cent mètres au paradis et revenir ici, chaque jour est le même et ne se ressemble pas. Je cours après les taxis, je cours après ma vie, si un roi me fait reine, je ne vivrais plus tout ça." Keren Ann.

C'est un samedi et il est presque midi.
Il y a du soleil, une chaleur sèche. Et du vent qui agite les pages de mon journal et mélange ma chronologie.
Plus loin, des vieilles dames autour d'une table. Et lui, qui pose sa tête entre ses bras et, le temps que je m'habitue à sa présence, il n'est déjà plus là. Sommeil éphémère.
Moi aussi, éphémère en ces lieux. Et, grâce au retardateur de l'appareil, seule mais pas vraiment seule.
Avant de rejoindre ma vie.

25.6.07

Intérieur nuit


Mais d'où Paris tient son nom de "ville lumière" ???
A Tokyo, il fait nuit à 19H30 et tout s'éclaire.
Tout sauf les cimetières et les ruelles tranquilles où seules brillent les enseignes des restaurants d'anguilles et de tonkatsu. Et où s'échappe de la musique des minuscules et vieux karaokés.
Ma rue est sombre mais, en bas, le distributeur veille. Et l'hôtel Cosmo, comme un phare.

24.6.07

Un thé chez la Reine (2)

Regarder ce livre, rien que le regarder, me donnait l'impression d'être chez la Reine. Les scones chauds sur lesquels on étale le beurre fondant. Les carrot cakes glacés blancs. Les gâteaux à la mélasse.
J'ai passé beaucoup de temps à rêver devant ces photos.
Parfois, je me suis décidée à tester une recette. C'était étrange, aucune n'était correcte. Il manquait toujours quelque chose. Et, parfois, je n'avais pas besoin d'essayer pour savoir que ça n'allait pas fonctionner : un gâteau à la carotte sans carotte, ah oui, vraiment ?!

Mais, dans ce livre, il y avait une recette de cake. Une recette infaillible parmi toutes ces utopies.
Un simple cake aux raisins mais alors, vraiment, le cake que je pourrai apporter sans rougir chez la Reine quand elle m'invitera pour le thé.
(Une petite parenthèse ici pour dire que je maîtrise parfaitement les temps de la langue française et que je sais ce que je fais quand j'utilise le futur plutôt que le conditionel pour parler de ma rencontre avec la Reine.)


Aujourd'hui, pour ce pique-nique parmi les cartons, c'est lui que j'ai eu envie de cuisiner. Je ne l'ai jamais fait depuis mon arrivée au Japon. Mais aujourd'hui, c'est sa texture dense et réconfortante que j'ai eu envie de retrouver.


Et c'est au moment où j'ai versé la pâte dans le moule -une pâte onctueuse qui se déroule en ruban- à ce moment précis que m'est revenu le souvenir du gâteau à la rhubarbe. C'est le même genre de pâte que j'étalais sur le fond de rhubarbe (la recette disait 300 g mais je mettais pas loin d'1 kg de ces tronçons odorants). Et m'est revenu le parfum et, en bouche, les fruits qui, devenus fondants, devenus compote, se mêlent à la pâte et l'humidifient parfaitement.

Combien de fois l'ai-je cuisiné, ce gâteau ? Il était vite devenu le préféré entre tous d'E. qui m'en voulait de toujours le faire quand on avait des invités parce que ça lui en faisait moins à manger ! Il était devenu son gâteau d'anniversaire mais il en aurait volontiers mangé tous les autres jours.
Comment ai-je pu passer autant de temps sans penser à ce gâteau ? Et comme il est étrange d'y repenser à une semaine de l'anniversaire d'E.

On m'aurait dit que j'allais être heureuse de vivre dans un pays où la rhubarbe n'existe pas, je ne l'aurais pas cru. (Tout le reste non plus...)

23.6.07

Reste(z)


Il est des habitudes que je n'ai pas envie de prendre.
Je ne veux pas que, chaque week end, le tofu ait un goût de départ.
Je ne veux pas que, chaque week end, les pique-niques soient des au-revoirs.
Je sais comment faire -je suis si souvent celle qui reste- : lever la main en direction du taxi, du vélo, du visage qui s'éloigne. Et l'agiter. Et sourire encore.
Ou rester sur le seuil, être celle qui reste sur le pallier.
Et dire "on s'écrira" et le faire, le faire. En sachant que ces mots n'auront pas cette saveur de proximité de ceux qu'on échange debout dans le couloir ("mais entre, entre, Gwen !), qu'on échange sur nos téléphones ("Super temps. bonheur. a tout de suite") ou sur nos écrans d'ordinateur ("un sushi demain midi, amie Alli ?!").

Je suis celle qui reste. Je souris. J'agite la main.
Mais, à l'intérieur : Revenez vite, je vous attends, revenez vite s'il vous plait.

Le ciel de Tokyo est bien trop intense, bien trop immense pour ne pas vouloir le partager.

22.6.07

La grande bouffe







On pourrait croire que j'ai passé ma journée à manger...
Et, en fait, c'est un peu ça !

21.6.07

C'est jeudi !

Et c'est ici que, le jeudi, je prends mes quartiers d'été.

20.6.07

ready


D'accord, il fait beau et chaud mais, au cas où, j'ai quand même acheté des chaussures waterproof.

19.6.07

Tuesday self portrait


Moi qui sais parfaitement comment mon visage va vieillir, qui n'ai aucune surprise lorsque, dans le miroir, je constate une nouvelle ride qui fait ressembler mes traits à ceux de toutes les femmes qui me précèdent dans ma famille, je me demande parfois ce que c'est que d'avoir perdu ses parents tôt, ou d'être adoptée. Et de ne pas savoir à l'avance celle qu'on sera, plus tard, dans pas si longtemps...

17.6.07

Jour de plage


Ce jour-là, ce jour de juillet 2005, au 72 de la rue Jean Bart, la bière était à la pression, les amis en nombre, la bibliothèque déjà en cartons.
A quelques jours du départ vers cet autre fuseau horaire, en cette journée longue, il était encore temps de parler, de trinquer, de rire... Il était encore temps de faire connaissance, in extremis, avec ceux, à peine croisés auparavant, que l'on découvrait et avec qui on aurait volontiers encore partagé quelques soirées, quelques bières, quelques mots...
C'était un peu comme dans les embouteillages du dimanche soir : tant d'amitiés possibles dans toutes ces voitures côte à côte mais, déjà, elles s'éloignent dans des directions différentes et on n'a même pas de temps pour les regrets.

Julie quitte le Japon dimanche prochain.
Je le savais le jour où j'ai fait sa connaissance. Dès ce jour-là, j'aurais aimé passer un peu plus de temps avec elle, pas seulement ce repas de Noël, pas seulement ce dimanche de hanami, pas seulement aujourd'hui au bord de la mer.
Je pense au monde tel que le verront ses yeux clairs. Je pense au monde tel qu'elle le montrera quand, dans sa main, il y aura un pinceau. Ses toiles seront lumineuses et heureuses, j'en suis certaine.

16.6.07

Les mots sont mes amis (3)

J'aime l'imaginer dans le passé de ses trajets quotidiens. Ce temps qu'il avait choisi de passer non pas les yeux dans le vague, non pas dans le sommeil, pas dans la lecture non plus. Un temps -deux fois une heure, chaque jour- qu'il avait décidé de consacrer à l'apprentissage d'une langue qui lui était chère mais ne lui était pas utile.
Il habitait dans un pays éloigné de la saveur des mochis, du macha et de la tempura. Mais le paysage qui défilait sous ses yeux se teintait de ces syllabes répétitives ka, ku, ki, mo, chi, ma, sa, to, tsu. Le paysage disparaissait sous le dessin des kanjis qui, peu à peu, imageaient son langage. Le sens des mots -main, banc, fille, coeur...- s'enrichissait de leurs associations et créaient un autre vocabulaire, une langue qui, maintenant, lui est personnelle, un peu secrète.
La langue de l'intime.

接心

Les mots sont des cadeaux.

15.6.07

5 photos vers le boulot

J'aimais bien cette idée, lancée par Thomas.
Moi, sans routine, sans direction répétitive, j'ai eu envie, en ce jour bleu, d'ajouter mon trajet, mon regard, à ce recensement original.
De chez moi à la Yamanote. Cinq minutes à pied. Des fleurs toute l'année dans les ruelles -en ce moment : la fin des fleurs magiques et jaunes. Mais elles vont refleurir en septembre. Deux feux non coordonnés -non, je n'attends pas tous les jours qu'ils passent au vert. Un Yoshinoya à l'angle. La voie du tram. Les distributeurs de tracts. Les vélos alignés. Les voix enregistrées, "Mamonaku, ichibansen ni...", portées par le vent au-delà de la gare.




Aujourd'hui, je change à Shinjuku. Direction Kichijôji dans la Chuo. Du bleu, décidément.

14.6.07

Jour de fete


12 millions d'habitants. Mais, le jeudi, le facteur ne s'y trompe pas et c'est à moi qu'il apporte du courrier !

13.6.07

Copine de personne

Je ne sais pas vous mais moi, je me suis inscrite sur Copains d'avant.com...
Il y avait une émission de télé, dans les années 80, je suis incapable de retrouver son titre. Mais dans cette émission, une star était invitée et arrivaient sur le plateau, des gens qui étaient en classe avec elle. Parfois une classe entière était reconstituée.
ça nous faisait fantasmer, cette émission. Je crois que chacun imaginait qu'un jour, la star, ça serait elle et que le reste de la classe viendrait lui faire coucou à la télé.
Or, cette émission n'existe plus depuis longtemps et, à ma connaissance, jamais personne, parmi les élèves de mes classes successives n'est devenu star au point de passer dans ce genre de divertissements (dans le public, je dis pas mais...).
Et les personnes les plus connues parmi mes amis sont des écrivains qui parlent sur France Culture et sur France Inter mais ne fréquentent pas les talk show de la télé (ils seraient sans doute moins mes amis !)
Moi, je n'aimerais pas être star, non merci... Et puis, ils seraient bien embarrassés, à la télé, de retrouver mes "copains d'avant"... d'abord parce que, sur le moment, je n'en avais déjà pas beaucoup. Mais, en plus, maintenant, sur le site, personne ne me liste parmi ses copains (c'est logique, finalement !) et personne ne formule d'avis de recherche dans ma direction (enfin, il suffit de taper mon nom sur google pour arriver ici, ça serait dommage de mobiliser la France entière pour ça !)... Elle serait un peu plombante, l'émission télé qui me serait consacrée !!!

Ceci dit, il y a, sur Copains d'avant.com, une rubrique qui me déprime complètement.

Votre vie personnelle et familiale est plutôt :
-très réussie, plus que je ne l'imaginais.
-conforme à mes rêves de jeunesse.
-moins réussie que je ne l'imaginais.

Il y a des gens que je connaissais qui ont coché la dernière réponse. Moi, je n'ai aucun mérite : je n'ai jamais rien imaginé concernant mon avenir alors, je ne risquais pas d'être déçue (toujours pas, d'ailleurs !). Mais, n'empêche : je n'avais peut-être pas de copains à l'école et je ne suis pas une star mais, au moins, j'ai opté pour la première réponse... NA !

12.6.07

Tuesday self portrait



Un an que je passe mes mardis dans les miroirs de Tokyo.

11.6.07

Puissance deux


Au Japon, le mois de juin est la saison des miroirs.

Et le ciel aime s'y regarder.

Et pour nous, heureux voyageurs, heureux spectateurs, ça fait le double d'horizon.

10.6.07

Dimanche 17H


Le dimanche à cinq heures, il y a un air frais qui fait presque regretter les manches courtes (ah vraiment, la météo est cyclotimique) mais qui rend les couleurs belles et donne envie d'en faire des photos.

Il y a des bouts de ciel qui flottent dans les caniveaux.

Il y a une jolie myse en abîme.

Il y a une fille qui, si elle était une fleur, serait narcisse.

Il y a des messages dans les miroirs qui ressemblent à de simples dessins.

Il y a un chat qui n'aime pas être interrompu dans sa toilette.

9.6.07

Non

Je peux répondre, ce soir, à la question de Madame Ga : finalement non.
Traversant les rues de Sugamo, me reviennent, dans la nuit humide, toutes les sensations de cette période de l'année.
La digestion difficile qui pousse au manque d'appétit. Les odeurs de friture ou de pressing, insupportables. La chaleur poisseuse qui pèse sur les épaules comme un vêtement superflu qu'on ne peut pas enlever. Le sommeil toujours plus court. Les pensées qu'on ne parvient pas à coordonner comme on voudrait parce que l'une d'entre elles prend le dessus : qui a mis le chauffage ??? Les températures en montagnes russes : au moment où, par désoeuvrement, on se résoudrait à aller faire les courses à 23H30 parce que, de toute façon, on ne fait rien et que, comme ça, ce serait fait... il se met à pleuvoir et, tout à coup, l'atmosphère rafraîchit...

Ce soir, j'annonce publiquement l'ouverture de la saison des pluies...

8.6.07

Petite dernière

Troisième et dernière de la série limitée décidée par nos parents. Je n'ai jamais cru que j'étais tellement plus favorisée que les autres...
C'est plutôt maintenant que je me sens particulièrement gâtée alors même que je ne me roule pas par terre, que je ne fais pas de caprice, que je ne demande rien !

Elle apporte de joyeuses fleurs. "J'ai vu, sur ton blog, que tu les aimais bien, celles-là."

Il m'offre des heures et des heures de musique. En l'état, c'est un peu un grenier mais je peux réaménager à mon goût. Garder, jeter, ranger.

"Quand, par les soirs d'été, le ciel harmonieux gronde comme une bête fauve et que chacun boude l'orage, c'est au côté de Méséglise que je dois de rester seul en extase, à respirer à travers le bruit de la pluie qui tombe, l'odeur d'invisibles et persistants lilas".
Quel beau cadeau, une phrase de Proust, le parfum de son jardin et un si beau plongeon de baleine.


Et puis, parfois, j'en formule un, de voeu...

Et, parce qu'elle est ma fée des lilas, elle l'exauce, d'un coup de pinceau magique... Et fait du facteur son complice pour qu'il m'apporte ces cartes un jeudi !

Gâtée, comblée.

7.6.07

C'est jeudi !

De quelle couleur sont Nos jeudis aujourd'hui ???
Rendez-vous sur notre palette...

6.6.07

Onze souvenirs et un à venir

Je sais que nous sommes composés de 80% d'eau.
Mais pour le reste ?
Des trucs et des machins, pas forcément inutiles.
Et de musique.
C'est comme si chacun de nous avait, dans ses composants internes, un iPod aux capacités de stockage illimitées.
Nous avons tous en mémoire des mélodies, des extraits de symphonies, des concertos brandebourgeois ou pas, un bout de voix qui fait frissonner le coeur et des tas de notes, des tas de chansons qui sont autant de souvenirs -anciens ou datant d'hier.
De ces morceaux qui, quand on les entend, nous projettent dans un autre temps.

Nouvelle radio aujourd'hui.
12 chansons plus ou moins légères. Plus ou moins graves.
Et leurs 12 raisons de se trouver ici.

1- Fille sans ambition, quand on me demandait ce que j'aurais voulu faire plus tard, je me contentais de répondre "je ne sais pas".
En moi-même, je pensais "femme fatale". Dénomination commode mais inexacte.
En fait, je me serais bien imaginée en personne élégante sans effort, portant naturellement robes de cocktail et talons hauts, à l'aise et tranquille dans tous les milieux. Une personne que tous -hommes et femmes- auraient eu tellement de plaisir à fréquenter qu'elle aurait été invitée partout et tout le temps. Y compris chez la Reine d'Angleterre à l'heure du thé.
Une femme intemporelle, une lady qui, en vieillissant, inspirerait une si jolie chanson à Neil Hannon.
J'en suis loin.

2- Une autre version que celle du Velvet. Une voix qui susurre à l'oreille des filles à vélo qu'elles ont de la chance de pédaler sans devoir y penser. On ne sait pas que, parfois, une traversée de la ville résulte d'un grand combat.

3-"Lay your head down in my arms". La chanson des retours dans la nuit. La chanson "ganbatte kudasai". La chanson que je chante et danse.
Un refrain qui ne me laisse pas insensible.
Si quelqu'un me disait ces mots à l'oreille, ma vie ne serait pas pareille.

4- Les années 90 étaient l'époque des films de Hal Hartley. Le visage de Martin Donovan puis d'autres. Des garçons sensibles et inaptes à l'expression de leurs sentiments. Les filles, plus sûres d'elles, savaient doucement leur montrer comment les aimer. Danser ensemble sur un air de Yo La Tengo était alors une preuve qu'on était soudés, que rien de grave ne pouvait plus arriver. De cela je reste persuadée.

5- L'écouter était ambigu. C'était me faire du bien du mal à la fois.
Je savais que nous finirions par les prononcer, ces paroles définitives qui séparent et après lesquelles on ne peut pas revenir en arrière.
Je le savais. Je redoutais ce moment. Mais j'espérais tant que tout irait mieux ensuite, ou alors moins mal. Qu'on cesserait d'être tristes, qu'on pourrait à nouveau vivre. Séparés et pourtant tellement ensemble, d'une autre manière.
A présent, je l'écoute sereinement. Et, bien sûr, quand on se croise on se sourit...

6- Nous étions en voiture sur les routes de campagne en Belgique. Et, parce que nous écoutions la chanson en boucle et que nous chantions à tue-tête, le paysage se teintait d'un petit air d'Amérique lorsque nous dépassions les stations Texaco.

7- Je ne penserais pas à lui s'il fallait citer mes chanteurs préférés. Mais, depuis son premier disque, sa voix de Suédois a toujours une place dans mes playlistes successives.

8- C'est la chanson de Koenji.

9- Nous étions en seconde. Pendant les cours d'histoire-géo, je préférais l'écouter lui plutôt que le prof. Il me plaisait beaucoup mais comme je sentais bien que je le laissais indifférent et que je ne voulais pas subir de revers, je me contentais de ces conversations qu'il voulait bien me donner.
Je l'ai revu plusieurs fois chez Jérôme, alors que nous étions adultes. Il était étonné quand je lui ai dit que je l'avais aimé.
Il écoutait the The alors je m'y suis mise !
"This is the day, your life will surely change"... depuis la seconde, je chante ça les jours où j'ai besoin d'espoir.

10- Au bout de 8 heures de cours, il me restait encore 2H30 de voiture. Il en fallait de la musique pour rester éveillée et, souvent, ça ne me suffisait pas.
A l'arrivée, malgré la fatigue, j'avais envie de sortir. Le Franglais était un peu devenu l'annexe de notre cuisine. Ensuite, il y avait toujours des amis à rejoindre au café. Parfois, c'était Sylvain qui aimait les Smiths

11- Je ne le voyais pas régulièrement alors, d'une fois sur l'autre, il avait les cheveux longs.
Il venait à l'improviste mais j'étais toujours là, toujours libre.
Il avait un nom qu'on n'oublie jamais. Christopher Good.
Pourquoi avions-nous évoqué Lewis Carroll, Tom Waits et Robert Wilson ? Il avait vu Alice. J'aurais aimé le voir aussi.
Nous avions convenu que, le jour où il recevrait un prix à Cannes, il glisserait mon nom dans son discours de remerciement !
Je ne l'ai pas oublié. Se souvient-il de moi ?

12- Cette chanson n'appartient pas (encore) à mes souvenirs.
Peut-être qu'un jour, en la rééentendant, je me dirai :
Ah oui, je vivais à Tokyo et j'écrivais un blog. Et des lecteurs, des lectrices m'écrivaient en retour et m'envoyaient tant de ce qui, en dehors de leurs 80% d'eau, fait qu'ils sont eux-mêmes.
Je sais que, ce jour-là, où qu'il soit dans mon futur, je me souviendrai à quel point ça me touchait.

5.6.07

Tuesday self portrait (sans sommeil)


Avant 6 heures, la ville est masculine. Au supermarché, je croise des travailleurs.
Dans le restaurant où je prends mon petit déjeuner -riz, natto, oeuf cru et soupe miso- ce sont aussi des hommes déjà fatigués qui mangent sur fond de jazz.
Cette ville ne dort jamais et moi à peine.

4.6.07

les mots sont mes amis (2)

âme (n.f.)
ami(e) (n.f.)
amical(e), -caux

Il m'a demandé à partir de quel âge j'avais vécu à Orléans.
"C'est pour ça que tu as une belle prononciation, n'est-ce pas ?"

Lille
lire (v.t.)
livre (n.m.)
Londres

Il a réglé le micro à ma hauteur et m'a demandé de parler pour faire un essai.

monsieur (n.m.)
montagne (n.f.)
montrer (v.t.)

Dans un premier temps, les mots ont profité des trois secondes dont je les espaçais pour avoir leur sens propre.

roman (n.m.)
rose (n.f.)
rouge (adj.)
rue (n.f.)

Puis, au bout d'un moment -comme dans les rêves où tout se fond- mis bout à bout, ils n'ont plus voulu dire qu'une seule chose : "Dors, nous le voulons !". Et les trois secondes rendaient ma respiration régulière et bien disposée.

vélo (n.m.)
vendredi (n.m.)
venir (v.i.)
Venise

J'ai toujours eu la capacité de m'endormir en tout lieu et à toute heure, y compris dans des situations qui ne s'y prêtent pas -en cours quand je suis au premier rang, au volant d'une voiture...

vouloir (v.t.)
vous (pr)
voyage (n.m.)
vu(e)

Mais je ne pensais pas pouvoir un jour m'endormir dans un studio d'enregistrement, bercée par ma propre voix.

3.6.07

Anonyme

C'est la magie des images achetées en lot aux puces ou trouvées en masse dans la rue...
Tout à coup se distinguent un visage attachant, une prise de vue singulière, une posture intéressante...
Tout à coup émergent des vies qu'on aimerait connaître. Ou bien non, pas des vies, juste des instants de ces vies.

Ce matin-là, pendant qu'il mangeait son bol de riz, avait-il appris par la radio la mort d'un physicien qu'il admirait ?

Regrettait-il cette nuit blanche, ce sommeil dilapidé en mots autour de verres de shochu ? Ou bien le sommeil qui parasitait sa journée n'était qu'un inconvénient insignifiant en comparaison du souvenir qu'il garderait pour longtemps de ce moment ?

Avait-il embrassé quelqu'un avant de monter dans le car ? Avait-il dit "je t'aime" dans la journée ?

2.6.07

Tremblement du coeur

Nous étions au soleil et rien ne pouvait nous arriver.
Rien ne pouvait nous arriver parce que nous avions encore tant de choses à nous dire, un thé à la cannelle à boire au canal café, plus tard une bière, et nous avions à regarder la nuit tomber et encore des côtes à grimper ensemble, à pédaler.
Nous étions au soleil sur des pierres qui se sont mises à trembler et c'était la terre qui tremblait.
Rien ne pouvait nous arriver, nous avons continué à parler.

1.6.07

Asakusa 10H15

La perception que j'ai de moi-même varie en fonction des personnes avec lesquelles je me trouve.
Ainsi, dans la même semaine, je peux me sentir tour à tour géante obèse ou top model. J'ai beau savoir que, dans l'un et l'autre cas, c'est un peu excessif, c'est comme ça !
Madame Gâ ne me tient pas rigueur de mon rituel quart d'heure de retard et m'accueille avec un "qu'est-ce que tu es jolie dans ce petit pull !!!"
Avec elle, je redeviens une grande fille toute simple, qui cache comme elle peut ses kilos en trop, qui coiffe comme elle peut ses cheveux trop longs. Une fille loin des extrêmes, qui marie les pois et les rayures. Et mange sans complexe ni remords sa glace au macha.
Et puis, madame Gâ enfile ses pieds de Cendrillon dans des chaussures de poupée, relève un peu le bas de sa robe pour juger de l'effet dans le miroir.
Et là, je sais que, décidément, je suis hors course.
Mais j'échange toutes les montées de marches à Cannes, les WE passés à regarder Jude Law jouer au tennis, les 5 à 7 avec Benjamin Biolay... contre ces journées douces et ensoleillées passées ensemble, ce petit shopping à 500 yens, ce bol de soba, ce melon pan partagé avec les enfants sages avant que ce soit l'heure des bières fraîches, au retour de l'homme.
Oui, vraiment, je garde tout ça. Aux autres les paillettes et les couvertures de Voici !