10.11.09

Tuesday self portrait (lectrice)

"11h

voyez-vous lectrice lecteur j'éprouverais peut-être une manière de satisfaction si je réussissais dans cette chronique à réduire un tant soit peu la place dévolue à mes
petites affaires privées je préfèrerais de beaucoup que l'extime l'emporte sur l'intime mais je n'ai pas la moindre assurance d'y parvenir autant que je le voudrais il m'est et me sera impossible je le sais de passer sous silence à tout le moins quelques-unes de mes émotions et difficultés toujours est-il que je me suis étendu à l'excès sur cet épisode d'amour que j'ai dérivé d'une façon presque catastrophique la raison en est sans doute que je viens de boire plusieurs verres de whisky à la suite je ne devrais pas quel manque de volonté n'est-ce pas je me souviens que ma mère m'avait déclaré un jour en constatant que je ne parvenais pas à m'arrêter de fumer tu n'as aucune volonté j'ai encore le son de sa voix dans la tête bref j'en suis là pour l'instant plusieurs verres de ce whisky dont j'ai déjà indiqué le nom j'ai assurément une raison bien à moi d'avoir recours au whisky J&B plutôt qu'à un autre rien ne m'empêcherait de vous faire part de cette raison mais je la garderai par-devers moi ainsi n'aurai-je du moins pas aggravé mon cas ce matin
et si je choisis de m'adresser directement à vous c'est en pensant à ce qu'a écrit henri michaux

Je compte sur toi, lecteur, sur toi qui vas me lire, quelque jour, sur toi lectrice. Ne me laisse pas seul avec les morts comme un soldat sur le front qui ne reçoit pas de lettres. Choisis-moi parmi eux, pour ma grande anxiété et mon grand désir. Parle-moi alors, je t'en prie, j'y compte."

Jacques-Henri Michot. Comme un fracas.

Cher Jacques-Henri,
j'ai découvert une faille dans mon emploi du temps qui m'a permis d'associer une terrasse au soleil, la saveur d'un thé vert et une cinquantaine de pages de ton livre.
Dit-on jamais assez le bonheur que procure la lecture ? Ce moment où, dès le début d'un texte, on le sent résonner, on se sait touché d'avoir été choisi comme témoin, comme lecteur, comme compagnon...
Jacques-Henri, merci de partager tes musiques, tes auteurs, tes faiblesses et tes emportements nécessaires.
Il était bien, ce midi, en ta compagnie. Et j'aime savoir que le plaisir d'entendre ta voix va durer encore plusieurs centaines de pages.
Je t'embrasse,
Gwen.

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