Jeeeeeves !
Plus jeune, j'ai beaucoup lu les romans de P.G Wodehouse. J'aimais leur ambiance so british : les cours de tennis, le thé à cinq heures avec une tante encombrante, les baronnets inconséquents qui, en trois paroles excessives, se retrouvaient fiancés contre leur gré et devaient, régulièrement, soigner les effets malheureux d'une gueule de bois.
Jamais ces garçons ne s'en seraient sortis tout seuls ! Heureusement, dans les coulisses, Jeeves veillait. Dans sa livrée rayée et ses gants immaculés, ce majordome savait ranger les raquettes, servir le thé impeccablement, défaire un engagement avant l'achat de la bague et, surtout, surtout... Il servait SON cocktail magique et réparateur à base d'oeuf les lendemains d'excès.
Quoi qu'il arrive, Jeeves était là...
A 8H17, près de la porte -mais pas du bon côté- dans la Yamanote, j'ai su que j'avais fait le mauvais choix. Et que, malgré ce que je persiste à croire, ce n'est pas moi qui commande. Ce corps en location a toujours le dernier mot.
Aussi, reconnaissant les symptômes -transpiration, tête qui tourne, difficultés à respirer, brique dans le ventre qui hésite à y rester- j'ai utilisé ma dernière énergie à traverser la foule compacte du train pour atteindre le quai de Harajuku avant de succomber au malaise.
A cette heure-là, les trains s'arrêtent toutes les deux minutes et ils sont tous aussi bondés que celui dont j'étais descendue. Les voix -masculine : "mamonaku, ichibansen ni...", féminine :" nibansen ni, abunaidesu kara..."- se répondent à l'infini, dans un écho permanent.
Je n'avais qu'une envie : me rouler en boule sur le sol -dans le sol. Oublier mon ventre, ma tête, m'oublier... Dormir.
Dormir, c'est ce que je ferais, par la suite, toute la journée. Et là, assise sur le quai, j'ai commencé cette drôle de nuit en plein jour.
Sa main gantée m'a réveillée. J'ai vu sa livrée impeccable. Son sourire inquiet et bienveillant. Il me proposait d'aller dormir dans son bureau. L'espace d'un instant, j'ai eu envie de lui dire : "Jeeves, soyez gentil, allez me préparer votre cocktail à l'oeuf". Au lieu de ça, je suis rentrée chez moi, me coucher.
8 commentaires:
Ouille !
J'espère que le sommeil a été réparateur et l'angoisse dissoute, au moins pour le moment.
Moi je me souviens d'un été sur la plage, avec ma mère et ma soeur, à lire les histoires de Jeeves à haute voix, chacune notre tour, pour en faire profiter les autres, yeux fermés au soleil. Je me souviens de notre complicité et des crises de rire à répétition, mais je suis incapable de me souvenir des histoires !!!
Cuidate chica !
Vu que tu as trouvé assez d'énergie pour rédiger ce post, je ne suis pas totalement inquiet, mais j'espère que ça va mieux (PS je commente peu ces derniers temps mais je continue à te lire chaque jour et on pense bien à toi)
Entre ça et le destin tragique des sasimis pas encore préparé qui ne pleurent même pas devant leur rue déserte -à quoi ça servirait de pleurer dans l'eau ? - hop, je m'abonne au blog.
jaime bien la maniere que tu as de tourner le reel, peut etre que si on avait eu la chance de t apercevoir hier, on n aurait vu qu une fille malade par terre, on aurait emis tout au plus quelques hypotheses quant a l origine du malaise, mais dans ton billet tout de suite ca prend des dimensions poetiques...
et j4rrete d essqyer de dire quelque chose de bien q pqrtir de ce clqvier jqponqis,
En vrai, ce jeudi n'avait rien de poétique ! Mais, en effet, I'm still alive !
(Et, Paul, je suis bien heureuse de vous savoir en vie aussi !)
Zzzz, une jeunesse entre Chantons sous la pluie et P.G. Wodehouse, n'est-ce pas ce qui nous permet, aujourd'hui, de chanter de manière assurée "et pourtant, nous sommes toujours debout, nous sommes encore debout et nous tenons le coup" ?!!!
Hi hi hi ! exactement !
En train de bosser et j'ouvre ton blog rien que pour écouter ta radio qui m'accompagne si bien ces jours-ci, et particulièrement cette chanson-là, qui me permet d'y croire tellement malgré tous mes doutes.
Optimisme et sécurité ontologique, malgré l'adversité quelle qu'elle soit, c'est notre motto.
Biz.
j'ai beaucoup lu PGW avec mon grand frere et certaint passages nous procuraient de bonnes crises de fou rire, et je l'ai surtout relu enceinte ou je riais dans les salles d'attente...
merci pour ce magnifique blog, quelle cadeau!
arigato goseimas.
Les livres de Wodehouse seraient donc des histoires de famille ! C'est ma mère qui me l'a fait connaître et ma soeur a l'intégrale !!!
Merci pour le compliment, merci d'être venue !
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