Ma rentrée littéraire (5 : Les oeuvres complètes de Georges Hyvernaud)
"L'important n'est pas qu'il arrive quelque chose à quelqu'un, mais que quelqu'un fasse quelque chose de ce qui lui arrive."
"Mais il y a les soirs. La chambre où l'on se retrouve. Pas drôle de se retrouver. De revenir à soi comme à une chambre toujours la même. Les mêmes impuissances, les mêmes dégoûts, la même poussière toujours et la même moisissure. Dans la journée, passe encore. On parle, on s'embête, on fait son métier. Mais le soir on a sa vie devant soi et on est bien forcé d'y regarder.
C'est des choses comme ça qu'il écrit, les soirs dans sa chambre. Des choses qu'il écrit pour se délivrer par les mots des hantises qu'il reçoit du monde. Qu'il écrit gauchement et obstinément, pour tenter, par la poésie, de se créer. Car il ne se satisfait pas de lui-même. Onze heures, minuit, le moment de la grande sincérité, le moment de la fatigue et du retombement, du doute."
La peau et les os.
"Qu'on les colle seulement à un portillon de métro, les duchesses de Marcel Proust ou de Balzac, qu'on les mette à faire des trous dans des bouts de carton toute la journée pendant huit heures, et tous les jours, du lundi au samedi, et on verra bien ce qui en restera de leurs drames distingués. On n'aura plus à décrire que de la fatigue et des varices, des notes de gaz et des démarches à la mairie. Pas très romanesque tout ça. La vie manque de romanesque quand on est obligé de la gagner."
Le wagon à vaches.
Les oeuvres complètes de Georges Hyvernaud sont brèves.
De retour de captivité, il constate que ceux qui l'ont pensé planqué n'ont cessé, pendant ces années, de manger le ragoût dont lui a eu le temps d'oublier le goût...
Puis, boudé par la critique, il ne parvient pas à imposer ses textes et cesse d'écrire.
Quelle raison aurait-il eu de déborder de joie ?
Les oeuvres complètes de Georges Hyvernaud sont brèves.
Mais essentielles.
"C'est ainsi que je voyais ma vie. J'avais beau l'examiner, la retourner, la secouer, pas un détail qui valût d'être conté, rien de surprenant, rien de drôle, rien de tragique, rien du tout.
Comme dans la plupart des vies. Tout le monde ne peut pas se payer une existence originale. La vie est chère, comme nous nous le répétons les uns aux autres. Hors de prix. C'en est venu au point que bien des gens y renoncent parce qu'ils n'en ont pas pour leur argent, ou parce que la vie constitue une dépense au-dessus de leurs moyens.
Moi, au moins, je peux encore m'offrir ça. Mais pas le modèle de luxe, naturellement. Non, je dois me contenter du type courant. Standard comme on dit. Une vie fabriquée en série, comme les aspirateurs, les appartements, les pardessus, les autos."
Lettre anonyme, nouvelles et autres inédits.
3 commentaires:
Tes lectures illuminent mes matins. Merci Gwen.
C'est la rentrée ; aussi a-t-elle dessiné une jolie grenouille qui mange des lettres ; elle est verte comme la plupart des grenouilles et une langue infiment longue pour attraper les lettres.
Ces billets de la rentrée sont goûteux ; savoureux, ça aide la passion de ne pas tomber dans la casserole à profusion traditionnelle, dites-vous Blanquette de Veau, Boeuf bourguignon, Bouillabaisse, Canard à l'orange, Cassoulet, Charlotte aux fraises, Choucroute, Coq au vin, Crêpe suzette, Cuisses de grenouille, Filets de poisson poché au vin, Fricassée de Poulet, Gratin dauphinois, Homard Thermidor, Ile flottante, Moules marinières, Mousse au chocolat, Navarin d'agneau, Oeufs brouillés, Oeufs pochés, Paupiettes de boeuf, Pot au feu, Poulet roti á la Provencale, Sole meunière, Soupe à l'oignon, Soupe de cerise, Soupe de cresson, Steack tartare, Suprême de poulet, Tapenade, Tarte à l'oignon, Tarte aux pommes, Tomates à la Provencale, Truite aux amandes, Veau marengo ?
Mais Madame, ici c'est un exquis d'écrivain dit la grenouille pas un instant nauséeuse (elle attrape les lettres avec la langue). Dehors, ils disent "devenez du matin !", il y en a pour tous les goûts à la rentrée, avec ambiance "bar ouvert à volonté" et les soldes le mois prochains. La rentrée littéraire sera légère.
Pays.
ces photos sont decidement a mourir de rire ; le texte moins. mais ca me donne envie de le chercher a la bib.
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