Du vrac (une rétrospective)
Chaque jour commence dans le bleu et quand la Yamanote me fait faux bond, c'est le bus qui me conduit à Ueno. Et je voyage avec François Truffaut.
Au Bad Ass café, le visage des filles est très rond et de la crème chantilly surplombe leur boisson.
A Jimbocho, on me dit "bonjour monsieur".
Dans les livres que j'achète d'occasion, rares sont ceux qui sont noircis d'annotations, de traductions ou d'interrogations au-delà du premier chapitre.
J'assortis mes yeux au bleu de Monastir. A avoir froid dans les cafés, on oublie à quel point il peut faire chaud de l'autre côté de la vitre.
Sur le quai n°7 se succèdent les trains ("abunai desu kara kiroi sen made...."), les courants d'air chaud et les mails qui font trembler mon téléphone, au creux de ma main. Quand ils sont au nombre de 994, ma boîte sature. Ils sont au nombre de 994. Et portent tous la même signature.
Dans les cafés, je dors, je lis, je bois des laits chauds, je bois des thés glacés, je rêve de savoir utiliser des crayons de couleur.
A l'Excelsior, en avance sur l'heure de mon rendez-vous, je m'extrais de tous les sons mêlés -conversations, musique, bruits de percolator, de couverts, de chaises- afin de poursuivre ma lecture.
Je ne peux, en revanche, faire abstraction du bruit des sacs plastiques que ma voisine -une vieille dame qui parle toute seule- agite et froisse en transvasant ses courses. Elle finit par les plier avec un soin maniaque, en les lissant contre le bord de la table et c'est comme si c'était contre mes nerfs.
(Anne-James Chaton en lecture)
Au Flying teapot, on rit à l'évocation d'Hubert Mounier et les musiciens jouent un peu comme si on n'était pas là. J'aurais aimé que la lecture dure et dure. Et, avant de donner nos adresses mail, on parle coiffure.
Au Flying teapot, on rit à l'évocation d'Hubert Mounier et les musiciens jouent un peu comme si on n'était pas là. J'aurais aimé que la lecture dure et dure. Et, avant de donner nos adresses mail, on parle coiffure.
En traversant la nuit à vélo, j'écoute Tarwater. D'une fenêtre ouverte s'échappe l'odeur forte et caractéristique des tatamis en été. Un de mes premiers souvenirs de Tokyo. Il y a trois ans.
"J'ai préféré ma paresse, la solitude ouatée des souvenirs obliques. Qu'importe : on n'écrit jamais que sur soi."
Jean-Baptiste Harang.
2 commentaires:
La cinquième photo me rapelle une amie qui avait commencé une collection de photo de personnes endormies, sur les bancs, dans les bus ou métro, dans les soirées entre amis, etc...
Mais c'est toujours un peu un vol...
L'homme qui dort est des plus vulnérable...
Dormir c'est s'abandonner.
Comme toujours tes photos sont belles et accompagnent superbement tes mots choisis.
C'est vrai, Bertrand, on est fragile dans le sommeil, le sommeil est abandon. Plus encore ici où on abandonne également dans le sommeil le téléphone sur la table, le sac à main grand ouvert... Et moi, au sommeil, je m'y abandonne en public autant que les autres, dans les cafés, dans les trains, souvent on ne peut pas lutter, moi pas plus que les autres.
Ici, le sommeil est un acte public et ordinaire, la bouche ouverte, la tête en arrière ou basculant sur l'épaule de son voisin ou posée sur une table.
La collection de ton amie serait un peu banale.
Et, tu as remarqué ? On dit toujours "commencer" une collection, jamais "finir"...
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