L'éternel retour
Attendre le train sur le quai, à la fin de l'après-midi d'un dimanche, c'était encore un retour en arrière, encore un. C'était encore -comme depuis mon arrivée- remettre mes pas dans mes empreintes tout en constatant que j'avais changé de pointure.
A la fin de la voie de l'aérotrain, j'ai tourné la tête à droite. Le spectacle y était inédit et magnifique : le ballet lent et majestueux d'un champ d'éoliennes en pleine Beauce, dans la lumière rêveuse du couchant.
(Cadeau inattendu d'un aller à Paris.)
Au bout du quai, j'ai retrouvé son sourire et, dans le métro, oublié de regarder les autres gens.
Descendre à Jourdain, c'était encore, encore revenir en arrière, du temps de Belleville. Et, de cette coïncidence, je ne suis même pas surprise.
La Tour Eiffel brille au loin. Les fenêtres sont sur cour. Le tofu est chinois. Le chat est bavard mais n'a pas une voix de castra. La bibliothèque est islandaise, japonaise, brésilienne. Il y a des pistaches dans les pâtes. Et Gérard se charge des desserts.
C'est un dimanche soir à Paris.
"C'était cela, cette autre vie, inopinément mêlée à la mienne, regardant l'opacité de ma vie avec les mêmes yeux attentifs que moi la sienne : une petite épiphanie. Puis sont venus le temps, la distance, la poussière. Mais j'en ai gardé en mémoire quelque chose de doux qui a nourri mes lendemains d'absence et de faim. Surtout le soir, les dimanches. J'ai retrouvé la manie de fumer en regardant au-delà des fenêtres pour voir ce que personne ne verrait."
Caio Fernando Abreu. Petites épiphanies.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire