Les balais de l'automne (8)
Avant de solder l'automne et de faire un grand ménage de printemps pour faire place nette à l'hiver...
Voici les derniers balais de la saison et quelques pages qui voudraient prouver qu'écrivain n'est pas un métier d'avenir...
"Mon fils écrit des poèmes, je n'y comprends rien. Il passe sa journée à écrire des poèmes, comme s'il n'avait rien d'autre à faire, il ne travaille pas, il ne lit pas, il ne voit pas d'amis, il écrit des poèmes et je crois qu'en plus ils sont très mauvais. Mon grand-père aussi avait beaucoup écrit de poèmes, et l'oncle Ferdinand, il faisait le tour de ses propriétés et écrivait des poèmes quand il ne chassait pas ou ne jouait pas du violon; c'était un être tyrannique. Mon grand-père et lui s'écrivaient en frères en vers ou en prose, ou en vers latins, mon fils ne sait pas le latin, il ne sait d'ailleurs rien qu'écrire des vers qui sont, selon toute probabilité, mauvais. Il ne travaille pas, il ne pense pas à son avenir, il n'écoute pas ses frère, il s'enferme et il écrit des vers comme s'il s'agissait là d'une occupation."
Ludovic Degroote. 69 vies de mon père.
"Nul ne peut t'empêcher d'écrire comme nul n'a pu empêcher Uncle Bandi de faire du tennis de table étant jeune, et même de devenir champion de Hongrie de tennis de table, mais encore faut-il, à l'exemple de Uncle Bandi, devenir effectivement champion, sinon à quoi bon écrire, et en tout cas cela ne dispense pas d'avoir un métier, un vrai, car il faut gagner de l'argent, qui ne tombe pas du ciel, qui ne vient pas plus sous la plume que sous la raquette, et il faut pouvoir offrir à soi-même et aux siens une vie décente, il y a même urgence car on ne sait jamais ce qui peut arriver."
Alain Fleischer. Quelques obscurcissements.
"Je n'ai que cinquante ans. Si j'arrête de fumer et de boire, ou plutôt de boire et de fumer, je pourrai encore écrire un livre. Des livres, non, mais un seul livre peut-être.
Je suis convaincu que tout être humain est né pour écrire un livre, et pour rien d'autre. Un livre génial ou un livre médiocre, peu importe, mais celui qui n'écrira rien est un être perdu, il n'a fait que passer sur la terre sans laisser de trace."
"Il n'a manifesté aucun remords, aucun regret, aucun repentir. Il n'a cessé de répéter : "il fallait que je le fasse, il fallait que je la tue, c'était la seule solution pour que je puisse écrire mon livre."
Les jurés ont estimé que l'on n'avait pas le droit de tuer quelqu'un sous prétexte que cette personne vous empêchait d'écrire un livre."
Agota Kristof. La preuve.
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