6.6.07

Onze souvenirs et un à venir

Je sais que nous sommes composés de 80% d'eau.
Mais pour le reste ?
Des trucs et des machins, pas forcément inutiles.
Et de musique.
C'est comme si chacun de nous avait, dans ses composants internes, un iPod aux capacités de stockage illimitées.
Nous avons tous en mémoire des mélodies, des extraits de symphonies, des concertos brandebourgeois ou pas, un bout de voix qui fait frissonner le coeur et des tas de notes, des tas de chansons qui sont autant de souvenirs -anciens ou datant d'hier.
De ces morceaux qui, quand on les entend, nous projettent dans un autre temps.

Nouvelle radio aujourd'hui.
12 chansons plus ou moins légères. Plus ou moins graves.
Et leurs 12 raisons de se trouver ici.

1- Fille sans ambition, quand on me demandait ce que j'aurais voulu faire plus tard, je me contentais de répondre "je ne sais pas".
En moi-même, je pensais "femme fatale". Dénomination commode mais inexacte.
En fait, je me serais bien imaginée en personne élégante sans effort, portant naturellement robes de cocktail et talons hauts, à l'aise et tranquille dans tous les milieux. Une personne que tous -hommes et femmes- auraient eu tellement de plaisir à fréquenter qu'elle aurait été invitée partout et tout le temps. Y compris chez la Reine d'Angleterre à l'heure du thé.
Une femme intemporelle, une lady qui, en vieillissant, inspirerait une si jolie chanson à Neil Hannon.
J'en suis loin.

2- Une autre version que celle du Velvet. Une voix qui susurre à l'oreille des filles à vélo qu'elles ont de la chance de pédaler sans devoir y penser. On ne sait pas que, parfois, une traversée de la ville résulte d'un grand combat.

3-"Lay your head down in my arms". La chanson des retours dans la nuit. La chanson "ganbatte kudasai". La chanson que je chante et danse.
Un refrain qui ne me laisse pas insensible.
Si quelqu'un me disait ces mots à l'oreille, ma vie ne serait pas pareille.

4- Les années 90 étaient l'époque des films de Hal Hartley. Le visage de Martin Donovan puis d'autres. Des garçons sensibles et inaptes à l'expression de leurs sentiments. Les filles, plus sûres d'elles, savaient doucement leur montrer comment les aimer. Danser ensemble sur un air de Yo La Tengo était alors une preuve qu'on était soudés, que rien de grave ne pouvait plus arriver. De cela je reste persuadée.

5- L'écouter était ambigu. C'était me faire du bien du mal à la fois.
Je savais que nous finirions par les prononcer, ces paroles définitives qui séparent et après lesquelles on ne peut pas revenir en arrière.
Je le savais. Je redoutais ce moment. Mais j'espérais tant que tout irait mieux ensuite, ou alors moins mal. Qu'on cesserait d'être tristes, qu'on pourrait à nouveau vivre. Séparés et pourtant tellement ensemble, d'une autre manière.
A présent, je l'écoute sereinement. Et, bien sûr, quand on se croise on se sourit...

6- Nous étions en voiture sur les routes de campagne en Belgique. Et, parce que nous écoutions la chanson en boucle et que nous chantions à tue-tête, le paysage se teintait d'un petit air d'Amérique lorsque nous dépassions les stations Texaco.

7- Je ne penserais pas à lui s'il fallait citer mes chanteurs préférés. Mais, depuis son premier disque, sa voix de Suédois a toujours une place dans mes playlistes successives.

8- C'est la chanson de Koenji.

9- Nous étions en seconde. Pendant les cours d'histoire-géo, je préférais l'écouter lui plutôt que le prof. Il me plaisait beaucoup mais comme je sentais bien que je le laissais indifférent et que je ne voulais pas subir de revers, je me contentais de ces conversations qu'il voulait bien me donner.
Je l'ai revu plusieurs fois chez Jérôme, alors que nous étions adultes. Il était étonné quand je lui ai dit que je l'avais aimé.
Il écoutait the The alors je m'y suis mise !
"This is the day, your life will surely change"... depuis la seconde, je chante ça les jours où j'ai besoin d'espoir.

10- Au bout de 8 heures de cours, il me restait encore 2H30 de voiture. Il en fallait de la musique pour rester éveillée et, souvent, ça ne me suffisait pas.
A l'arrivée, malgré la fatigue, j'avais envie de sortir. Le Franglais était un peu devenu l'annexe de notre cuisine. Ensuite, il y avait toujours des amis à rejoindre au café. Parfois, c'était Sylvain qui aimait les Smiths

11- Je ne le voyais pas régulièrement alors, d'une fois sur l'autre, il avait les cheveux longs.
Il venait à l'improviste mais j'étais toujours là, toujours libre.
Il avait un nom qu'on n'oublie jamais. Christopher Good.
Pourquoi avions-nous évoqué Lewis Carroll, Tom Waits et Robert Wilson ? Il avait vu Alice. J'aurais aimé le voir aussi.
Nous avions convenu que, le jour où il recevrait un prix à Cannes, il glisserait mon nom dans son discours de remerciement !
Je ne l'ai pas oublié. Se souvient-il de moi ?

12- Cette chanson n'appartient pas (encore) à mes souvenirs.
Peut-être qu'un jour, en la rééentendant, je me dirai :
Ah oui, je vivais à Tokyo et j'écrivais un blog. Et des lecteurs, des lectrices m'écrivaient en retour et m'envoyaient tant de ce qui, en dehors de leurs 80% d'eau, fait qu'ils sont eux-mêmes.
Je sais que, ce jour-là, où qu'il soit dans mon futur, je me souviendrai à quel point ça me touchait.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Et Pareto qui s'évertuait à nous démontrer chiffrage à l'appui que 80 % des effets dépendent de 20 % des causes (je repense aussi à Routh et ses critères qui n'ont absolument rien à voir avec ce sujet instable de goûts et de couleurs) ; oui il suffit de l'écouter la musique pour se rendre compte qu'un rien peut être tout, et que 20 % même si c'est moins, ça n'est pas rien. Plein de promesses, onze souvenirs et un avenir.

Pays de Neige.

Anonyme a dit…

Autants de perceptions que de propriétaires de 20%.

Anonyme a dit…

salut,
je profite de ce sujet pour dire que j'aime bien ton blog parce que quand je le lis ça me fait un effet similaire à celui de l'ecoute d'un tres bon cd l'heure de la sieste. le genre de cd qui te fait oublier que tu es sur ton lit mais plutot sur un hamac l'été avec l'odeur de la campaggne et le chant des cigales.
on s'y croirait
amicalement

Anonyme a dit…

Quand tu dis "J'en suis loin. ", tu te sous estime.
Moi je suis sur que si la reine d'angleterre te connaissait elle voudrait certainement t'inviter à prendre un thé. Surtout que tu es une connaisseuse...
Et puis l'ambassadeur de France t'a invité à sa garden party, rappelle toi!

Anonyme a dit…

Par tes commentaires sur chacune des pièces que tu as choisies on a presque l'impression de te connaître sans t'avoir jamais rencontrée, et d'entrer, un peu, dans ton univers ;-)
Ta musique est excellente et variée, j'aime beaucoup la 2e car ma fille s'appelle Stéphanie et un ami la lui a déjà offerte, dans l'autre version... j'aime beaucoup la nouvelle.
Je passe toujours de très bons moments sur ton blog
Ta lectrice du Québec

itadakimasu a dit…

80% d'eau, le reste c'est grosso modo de l'azote et du carbone.