26.12.08

Aller voir la mer (ou pas)

J'avais regardé l'itinéraire, le changement de gare, j'avais tout préparé, je m'étais préparée.
Mais, au moment où j'ai enfilé mon col roulé, le soleil est venu frapper à ma fenêtre. Et puis les carillons du balcon que le vent secouait en rafales, les vitres qui tremblaient et la chute de 10° depuis la veille m'ont rappelé que ce que je préfère dans la mer en hiver, c'est le moment où on en revient, où on colle ses mains contre une tasse brûlante et où on sent sa peau resserrée, après la morsure du froid.
Alors, j'ai jeté en pluie de la crème de riz dans le lait de soja chaud et une poignée de raisins dans le fond du bol, j'ai remis de l'american breakfast tea dans un sachet sans regarder l'heure.
Et j'ai continué à lire, dans la chaleur d'une flaque de soleil pendant que, dans le livre, la tempête se levait.
Je me suis bien vue rester là toute la journée, me relever de temps en temps pour remettre de l'eau à chauffer, couper des morceaux de pomme et les saupoudrer de kinako si j'avais encore faim.

"Deux grands goélands sont venus gueuler devant les bateaux, le cou étiré, les ailes écartées, tout le corps tendu vers le ciel. Brusquement, ils se sont tus. Le ciel s'est épaissi encore, il est devenu très sombre mais ce n'était pas la nuit.
C'était autre chose.
Une menace.
C'était cela qui avait fait taire les oiseaux.
On m'avait avertie, Quand ça va commencer, il faudra plus être dehors.
Les pêcheurs ont vérifié une dernière fois les amarres des bateaux et ils sont partis, tous, les uns après les autres. Un rapide coup d'oeil de notre côté.
Les hommes sont plus forts quand la mer remonte, c'est ce qui se dit ici. Les femmes profitent de ces moments pour se coller à eux. Elles les saisissent là où ils sont, au fond des écuries ou dans les cales de bateaux. Elles se laissent prendre.
Le vent sifflait déjà . C'était peut-être cela le plus violent, plus encore que les vagues. Ce vent, qui chassait les hommes."
Claudie Gallay. Les déferlantes.

Et puis, finalement, je suis allée voir la mer.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est beau n'est-ce pas ?
Et le vent, le vent qui souffle dans les pins que bordent les ajoncs, le vent qui fait rouler l'eau de la baie et voler si vite les cormorans au dessus de nos têtes, le vent qui nous pousse dans le dos puis nous empêche d'avancer quand on a fait demi-tour... J'ai adoré ce vent de bord-de-mer...

En rentrant, j'ai bu un thé de Noël - et toi ?

J.

Anonyme a dit…

Aussi Percé ou Ouessant
le sommet d’une haute tour dans la ville
un champ
laminé d’embruns
de reste de falaise d’amertume

de reste d’une terre
de rien d’autre que du sable
pas indemne d’un désert

seul avec Percé
seul où les drapeaux abimés flottent
sous l’Arcane halo sans la moindre pierre

il y a ces retours ces roches

au fond d’un mug brûlant
des lèvres et l’ombre du visage

Il dit encore :
« ce haut-pays
affamé de moins qu’il ne possède » ..
il n’y a pas de question ..
pas de cime ..
et pas de vent ni de trace ..
qui ne soient involontairement oubliés ..
par le scribe des lieux ..
par la mer et son auteur ..

- qui n’a éprouvé aucun dommage
à traverser la mer ?

avec une lecture
un soir - s’installe le chant de la mer
Elle dit :
j’ai vu deux grands goélands
tendus vers le ciel
devenus sombre devenus nuit ;

les amarres saisissaient
la mer et le vent chassait
les hommes.

Pays de Neige.

Gwen a dit…

J., c'était magnifique mais surtout derrière le verre car le vent avait décidé de faire de moi un cormoran...
(pour moi aussi, c'était Noël dans mon thé !)
Pays de, c'est Bercy, un peu, aussi.